Par Sharon Wajsbrot Publié le 18 mai 2025 à 09:00
Pour certains, c’est l’occasion de briller, parfois bien au-delà de leur cercle d’influence habituel, grâce aux puissants relais des réseaux sociaux. Pour d’autres, c’est un douloureux moment à passer, qui leur colle à la peau pendant des mois. Mais désormais, c’est un passage obligé.
Appelés quasiment quotidiennement à la barre des commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui se multiplient sur tous les sujets du débat public - de l’affaire Nestlé aux freins à la réindustrialisation, en passant par l’utilisation des aides publiques aux entreprises ou encore la multiplication des plans de licenciement - les dirigeants d’entreprises françaises sont partagés entre un profond agacement et l’envie irrépressible de faire passer des messages à cette tribune d’un nouveau genre.
[…] La ligne de crète est étroite. Face à des élus qui soufflent le chaud et le froid et jouent parfois aux enquêteurs, voire aux inquisiteurs, certains patrons peuvent perdre leur calme. En début de semaine dernière, Rodolphe Saadé, le PDG de la Compagnie maritime CMA-CGM, n’en est pas passé loin.
Questionné par le rapporteur de la commission d’enquête sur les aides publiques - le sénateur PCF Fabien Gay - sur le traitement de faveur dont bénéficierait sa compagnie, grâce à la taxe fameuse taxe au tonnage que certains voudraient supprimer avec d’autres niches fiscales, Rodolphe Saadé n’a pas résisté à un exercice de recadrage.
« Monsieur le président et monsieur le rapporteur, puisque vous aimez les chiffres : la BPI a investi 150 millions d’euros dans CMA-CGM et elle a récupéré à ce jour 435 millions d’euros. Donc, l’affaire n’était pas mal pour l’Etat. Non ? Si tous les investissements de l’Etat rapportaient autant, on n’en serait pas là je crois… », a-t-il lancé, achevant sa démonstration avec une moue de dédain.
Encore plus agacé par les questions sur son déplacement dans « le bureau de Donald Trump » pour annoncer son plan d’investissement à 20 milliards, le PDG de CMA-CGM a opté pour la question rhétorique. « C’est le président des Etats-Unis, je fais 25 % de mon chiffre d’affaires aux Etats-Unis, j’ai la chance d’aller le rencontrer et je vais lui dire non ? ».
Début février, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée, le patron de Renault, Luca de Meo, n’avait pas non plus résisté à laisser transparaître un certain agacement. Largement interpellé sur le sort de la Fonderie de Bretagne, un sous-traitant que le constructeur est suspecté d’avoir d’abandonné à son sort, il a fini par lâcher : « j’ai répondu 10 fois à la même question ». Lire la suite.