Yannick Jadot relaxé contre TotalEnergies qui le poursuivait pour diffamation

Vendredi 6 juin 2025

Le sénateur écologiste Yannick Jadot, poursuivi en diffamation par TotalEnergies pour avoir accusé le groupe d’être « complice de crimes de guerre » de la Russie en Ukraine, a été relaxé vendredi par le tribunal correctionnel de Paris.

Agence France-Presse 6 juin 2025 à 16h37

Le sénateur écologiste Yannick Jadot, poursuivi en diffamation par TotalEnergies pour avoir accusé le groupe d’être « complice de crimes de guerre » de la Russie en Ukraine, a été relaxé vendredi par le tribunal correctionnel de Paris.

Le tribunal a retenu « la bonne foi » de l’ancien candidat à l’élection présidentielle.

Yannick Jadot, présent dans la salle d’audience, était poursuivi par le groupe pour 19 séries de propos, datant de mars 2022, peu après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe le 24 février.

« Cette décision démontre que TotalEnergies ne pouvait - et ne peut toujours pas aujourd’hui - ignorer que ses activités en Russie contribuent au financement du régime poutinien et des crimes de guerre commis en Ukraine », a réagi l’ex-député européen après la décision de la 17e chambre correctionnelle.

« C’est une excellente nouvelle pour le débat public et la liberté d’expression que TotalEnergies veut saper à travers des procédures-bâillons », a-t-il ajouté, demandant au président de la République « d’exiger du groupe pétrolier son retrait d’une dictature coupable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité ».

TotalEnergies a pour sa part pris « acte de la relaxe prononcée par le tribunal, au motif que ces propos diffamatoires relevaient du débat public s’inscrivant dans le contexte particulier de la campagne présidentielle de mars 2022 ».

TotalEnergies rappelle aussi dans un communiqué « qu’elle condamne fermement, depuis le début de la guerre en Ukraine, l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine et qu’elle a mené ses activités en Russie, passées ou présentes, de manière transparente, (…) dans le cadre de la politique énergétique européenne ».

« En cette période sombre de criminalisation de l’action et de la parole des responsables et militants écologistes, c’est une belle éclaircie », a réagi de son côté l’avocat de M. Jadot, Me William Bourdon.

Selon le tribunal, M. Jadot disposait « d’une base factuelle » pour imputer à TotalEnergies « une participation au financement de la guerre en Ukraine » même si, a reconnu la juridiction, son propos n’était pas formulé « de manière nuancée ».

TotalEnergies a contribué « indirectement à alimenter le budget de l’Etat russe et donc à financer la poursuite de la guerre en Ukraine », a indiqué le tribunal.

Quant à l’accusation la plus grave, celle de « complicité de crime de guerre », les magistrats de la 17e chambre rappellent que Yannick Jadot « ne s’exprimait pas en qualité de juriste mais de candidat à une élection présidentielle s’interrogeant sur les implications du maintien d’un grand groupe français spécialisé dans les hydrocarbures en Russie ».

  • « Sens éthique mais non juridique » -

« Le terme de "complicité" doit être entendu ici dans un sens éthique, moral, voire politique, mais non juridique », a relevé le tribunal.

« Le prévenu pouvait valablement, dans un cadre électoral, se faire le porte-parole, en ces termes, des analyses qui se faisaient jour au sein de la société civile sur le rôle de TotalEnergies en Russie », a tranché la juridiction.

« En période électorale, la vivacité des propos est plus tolérable qu’en d’autres circonstances », a également fait valoir le tribunal qui note que « les hommes politiques (peuvent) avoir une certaine dose de provocation ou d’exagération ».

Selon le tribunal « aucune animosité personnelle » opposait M. Jadot à TotalEnergies.

Lors de l’audience, en mars dernier, l’avocat de TotalEnergies, Me Antonin Lévy avait dénoncé la « répétition insupportable » par Yannick Jadot de l’« accusation extrêmement grave » de complicité de crimes de guerre.

TotalEnergies réclamait un euro symbolique de dommages et intérêts au sénateur écologiste.

Pour justifier sa présence en Russie, le groupe assure que s’il quittait la Russie la France pourrait faire face à un « black-out énergétique ».

aje/mat/dch

Agence France-Presse

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