Sarah Vandenbroucke est docteure en droit et sociologie de l’université de Leiden (Pays-Bas) et administratrice de l’Observatoire de l’éthique publique.
Publié hier à 07h00 Temps de Lecture 3 min.
Alors que la date d’application de la directive européenne sur le devoir de vigilance (CSDDD) a déjà été repoussée à 2028 par l’Union européenne, le président Emmanuel Macron a annoncé, lors du sommet Choose France du 19 mai, souhaiter sa suppression pure et simple. Il rejoint ainsi le chancelier allemand, Friedrich Merz, dans une posture aussi brutale qu’incompréhensible. Brutale, car elle s’attaque à un texte de compromis porté démocratiquement par les institutions européennes, fruit de longues négociations ; incompréhensible, car elle balaie une vision stratégique pour une Europe plus responsable.
Cette directive avait pourtant déjà été considérablement édulcorée ces derniers mois. En avril, le Parlement européen a adopté la directive dite « omnibus », qui vise à minimiser certaines réglementations-clés du pacte vert, dont la CSDDD. Présentée comme une « simplification » face aux pressions de milieux économiques et politiques, cette réforme cache un véritable recul législatif, dénoncé par de nombreuses organisations de la société civile.
En appelant à l’abandon complet de la directive, le président français franchit un cap : celui de la renonciation au mouvement de responsabilisation des entreprises, que sa majorité a elle-même lancée avec la loi Pacte de 2019. En préférant le retour au dogme de la croissance grise à celui de la croissance verte qu’il avait promue, il va à contresens de l’histoire en affaiblissant la capacité de l’Europe à affirmer sa souveraineté normative face à une mondialisation dérégulée. Lire la suite.