Dubaï Papers : le Parquet financier envisage des poursuites contre 25 personnes

Vendredi 18 juillet 2025

Le Parquet national financier (PNF) envisage des poursuites dans le dossier des « Dubaï Papers » pour 25 personnes soupçonnées d’avoir mis en place pendant vingt ans un système complexe qui aurait permis à des centaines de contribuables « d’égarer l’administration fiscale ».

Agence France-Presse 18 juillet 2025 à 16h41

Le Parquet national financier (PNF) envisage des poursuites dans le dossier des « Dubaï Papers » pour 25 personnes soupçonnées d’avoir mis en place pendant vingt ans un système complexe qui aurait permis à des centaines de contribuables « d’égarer l’administration fiscale ».

Selon des éléments d’une note du 30 juin transmise aux parties dont l’AFP a eu connaissance vendredi, le PNF « envisage des poursuites » pour complicité de fraude fiscale et de fraude fiscale en bande organisée, pour blanchiment en bande organisée de fraude fiscale et de fraude fiscale aggravée ainsi que pour association de malfaiteurs délictuelle.

Cela viserait trois sociétés au cœur du système présumé, dont Helin International Fze, ainsi que 16 hommes et six femmes.

Parmi les suspects, un quatuor considéré comme central : le prince belge Henri de Cröy, 66 ans, son frère Emmanuel de Cröy, 67 ans, la Britannique Géraldine Whittaker, 82 ans ainsi que, pour la période allant jusqu’en 2012, l’Italienne Maria de Fusco, 60 ans, suspectée d’être à la tête d’un réseau de sociétés offshore.

Lors d’auditions dont l’AFP a eu connaissance, Henri de Cröy et Maria de Fusco ont plutôt contesté ou tempéré le rôle qui leur est prêté, tandis qu’Emmanuel de Cröy a lui reconnu une partie des faits. Geraldine Whittaker a elle très largement contesté toute infraction.

Tous ces protagonistes ont reçu fin juin une note de synthèse du PNF. Ils peuvent désormais émettre avec leurs conseils des observations, avant la décision finale du ministère public sur des poursuites éventuelles, voire sur un procès correctionnel parisien d’ampleur.

  • Clé USB -

Le dossier des Dubaï Papers, révélé par L’Obs en septembre 2018, reposait sur une fuite de 200.000 fichiers, mémos, mails, lettres et télécopies.

Le PNF avait ouvert une enquête, nourrie du contenu d’une clé USB remise anonymement début 2019.

Dans les années 1980 a été créée une première société de gestion de patrimoine en Suisse, Jawer, puis une deuxième a ensuite été lancée aux Emirats Arabes Unis à la fin des années 2000, pour « anticiper la levée du secret fiscal suisse », selon un rapport d’enquête d’avril de la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF).

La BNRDF évoque « sur une période de plus de 20 ans, un système organisé, hiérarchisé et opaque, proposant à ses clients une assistance massive et systématique à la fraude fiscale et au blanchiment de cette infraction » via « une ingénierie financière et juridique sophistiquée, adaptée à leurs besoins spécifiques » et « une adaptation permanente aux évolutions réglementaires et législatives ».

« La "plus value d’Helin" consistait en la mise en place de mécanismes sur mesure, ayant pour but d’égarer l’administration fiscale et d’empêcher toute velléité de contrôle », assurent encore les enquêteurs.

En échange, la société aurait facturé à ses clients des commissions, prélevé un pourcentage sur les flux circulant, et reçu de banques partenaires « des rétrocessions sur présentation de clients ».

La Brigade présente Henri de Cröy comme le « principal instigateur, architecte et animateur de ce réseau complexe », mais aussi « le principal bénéficiaire au plan financier ».

  • Remises d’espèces -

Interrogé par l’AFP, l’avocat de M. de Cröy, Me Emmanuel Marsigny, a indiqué « prendre acte » de l’ouverture « enfin » au contradictoire après six ans d’enquête, ce qui « va permettre à la défense d’exercer les droits qui lui sont désormais ouverts ».

D’après la BNRDF, le système Helin fonctionnait ensuite via des « mises à disposition », soit des remises d’espèce, des cartes bancaires de paiement ou de retrait, anonymes ou au nom de tiers, ou encore des pyramides de sociétés dissimulant le propriétaire réel de patrimoine en France.

Selon des estimations provisoires de la BNRDF, 200 millions d’euros d’avoirs auraient été dissimulés au fisc par 322 résidents fiscaux français, soit un préjudice pour le Trésor public de 28 millions d’euros de droits éludés, voire près de 50 avec les pénalités, majorations et amendes.

Dans ce dossier, également objet d’investigations en Belgique et en Suisse, le PNF avait appelé début 2023 les contribuables français à se dénoncer.

Un certain nombre d’entre eux ont déjà été redressés, ou condamnés lors d’audiences de plaider-coupable.

Après la révélation de l’affaire, « une partie a fait une régularisation fiscale (…), une autre persistait dans un comportement de dissimulation », note la Brigade.

Agence France-Presse

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