Les hedge funds : placements vraiment risqués ?

Mardi 25 septembre 2007 — Dernier ajout lundi 24 septembre 2007

FINANCE : Les hedge funds : placements vraiment risqués ?

Date de parution : Lundi 24 septembre 2007

Auteur : Reinhard Mueller, Head of Institutional Alternative Business Development, GAM.

GESTION. La question de l’impact des faillites de hedge funds sur la place financière suscite de plus en plus d’inquiétude et la problématique du risque est sur toutes les lèvres. Il est donc nécessaire de distinguer entre les types de risques et de savoir s’ils peuvent freiner la performance.

Une gestion du risque extrêmement rigoureuse fait toute la différence entre les hedge funds performants et les autres. Mais quels sont effectivement les risques qu’un hedge fund doit surmonter, et comment peut-il le faire sans pour autant brider la performance ?

Le premier risque à éviter est la pratique d’activités frauduleuses. Cela semble évident, mais plusieurs fonds réputés ont échoué sur cet écueil. De telles pratiques sont rendues possibles par des contrôles opérationnels insuffisants au sein des fonds ou de leurs sociétés de gestion. Bien que les gérants soient libres d’appliquer ou non des contrôles en matière de risque conformes aux meilleures pratiques, ils choisissent le plus souvent de mettre en œuvre des mesures volontaires de lutte contre la fraude telles que la validation externe des prix, la surveillance du financement et l’audit comptable. Par ailleurs, la maturité croissante du secteur, conjuguée à la participation accrue du segment institutionnel et à l’influence de plus en plus importante des fonds de hedge funds, a contribué à définir de nouveaux standards en termes d’intégrité des fonds.

Un autre risque, parfois sous-estimé ou mal compris, est celui de la liquidité. Si plusieurs investisseurs décident soudainement de retirer leurs capitaux du fonds, cela oblige le gérant à débourser d’importantes sommes alors que les titres qu’il détient ne sont pas nécessairement négociables sur un marché liquide ou qu’il est lié par des contrats qui n’arrivent pas à échéance avant un certain temps. Il cherchera donc à mettre sa stratégie à l’abri de cette menace au moyen de divers mécanismes de protection.

Un troisième risque pouvant compromettre la performance d’un fonds est la dérive de style, qui consiste, pour un gérant, à s’écarter de la méthode de placement annoncée. Il peut, par exemple, investir dans des secteurs qui n’appartiennent pas à son domaine de spécialisation, modifier la concentration ou le profil de risque du portefeuille ou appliquer de nouvelles règles en matière d’achat et de vente. Ces changements peuvent apparaître progressivement du fait d’une approche opportuniste visant à dégager des rendements, ou être le résultat d’un manque de rigueur de la part du gérant. Une procédure rigoureuse de due diligence permet normalement d’identifier et d’éviter ce risque.

Lorsqu’il s’agit de gérer de l’argent, un des dangers les plus difficiles à maîtriser est celui des choix stratégiques. Le risque d’erreur d’évaluation est en effet inhérent à toute stratégie active de placement. Cela dit, si aucune procédure de due diligence, aussi rigoureuse soit-elle, ne permet d’offrir une garantie totale, le gérant qui a de nombreuses années d’expérience dans la bonne mise en œuvre de sa stratégie présente naturellement plus de chances de miser sur le bon cheval.

L’investisseur n’a pas d’autre moyen de minimiser ce risque que de s’assurer que le gérant mesure pleinement les répercussions d’un éventuel coup de tabac et qu’il peut maîtriser la situation quel que soit le marché. En effet, si la grande majorité des fonds ont perdu des plumes au cours de la dernière tem-pête, les meilleurs d’entre eux se sont déjà rétablis et commencent à saisir les nouvelles opportunités de placement qui se sont fait jour.

Si personne ne met en cause l’utilité de la transparence dans le cadre de l’évaluation et de la gestion du risque, les opinions divergent quand il s’agit de définir le niveau de transparence souhaitable.

De nombreux investisseurs, et même les autorités de réglementation, ne disposent en effet ni des connaissances ni des systèmes nécessaires pour interpréter correctement la composition d’un portefeuille. Les gérants, de leur côté, considèrent que trop de transparence équivaut à une perte de propriété intellectuelle et craignent que le seul fait de partager des informations rend celles-ci inefficaces.

Les investisseurs qui perçoivent le manque de transparence comme une source supplémentaire de risque doivent être intimement convaincus des compétences et de l’intégrité du gérant et comprendre parfaitement la philosophie et la mise en œuvre de sa méthode de placement ainsi que ses attentes en termes de performance.

Les récents événements ont relancé le débat sur une réglementation des hedge funds destinée à protéger les investisseurs contre les risques qu’ils présentent. Actuellement, il existe encore d’importantes disparités en la matière à l’échelle mondiale. Mais à mesure que la communauté des investisseurs demande des contrôles plus stricts sur les pratiques de placement, il est possible que l’on observe une harmonisation des législations.

Il existe bien sûr d’innombrables autres risques à évaluer avant d’investir dans un hedge fund. Mais dans la mesure où le monde de la finance cherche à éviter toute nouvelle crise sur les marchés, les investisseurs devraient bientôt bénéficier d’une plus grande transparence et de contrôles réglementaires plus stricts.

Ces dernières années, le secteur des hedge funds a connu une croissance fulgurante. Les investisseurs sont en effet attirés par le potentiel de protection du capital et de rendements absolus décorrélés des marchés traditionnels. Selon les estimations de HFR, le secteur totalisait fin 2006 plus de 1430 milliards d’USD d’actifs sous gestion répartis dans 9462 hedge funds à travers le monde, dont 547 milliards d’USD, soit quelque 38%, dans plus de 2200 fonds de hedge funds. Ce chiffre est appelé à progresser à mesure que les promoteurs de fonds de pension cherchent à porter leur allocation aux hedge funds de 2 à 5% actuellement à entre 20 et 25% sur les dix à quinze prochaines années.

Reste à savoir si les récents événements atténueront l’enthousiasme des investisseurs pour les placements alternatifs et finiront par freiner l’expansion du secteur. En effet, s’il est indiscutable que les marchés se stabilisent, de nombreuses sources d’incertitudes et de volatilité persistent, incitant les investisseurs à rester prudents.

Quelle que soit l’opinion actuelle des investisseurs, le secteur des hedge funds a atteint une telle taille, et son influence est si grande, que sa survie semble garantie. Et compte tenu de son historique impressionnant (fin juin 2007, l’indice HFRX Global Hedge Fund affichait une progression de 13% sur les douze mois précédents) il semble peu probable que le marché le boude longtemps.

A condition de l’aborder en toute connaissance de cause, cette catégorie d’actifs devrait donc rester une option intéressante qui recèle un potentiel de rendement attrayant à long terme.

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