Un sulfureux pétrolier vend sa villa pour 60 millions

Dimanche 10 octobre 2021

Afrique

Un sulfureux pétrolier vend sa villa pour 60 millions

Jean-Pierre Valentini a été le « M. Afrique » de Trafigura et conduit les bolides d’une écurie dubaïote. Depuis février, il est mis en examen en France pour avoir frayé avec le gratin du milieu corse, l’île dont il est originaire

Marc Guéniat Publié dimanche 10 octobre 2021 à 19:28

L’Afrique, c’est chic. C’est ce que doit se dire Jean-Pierre Valentini, négociant en pétrole par métier et longtemps responsable du continent au sein de Trafigura, le géant du courtage établi à Genève. Désormais installé à Dubaï, le quinquagénaire a vendu fin août sa villa à Cologny, sur la rive gauche du Léman, pour 60,5 millions de francs, comme l’a récemment révélé 20 minutes. Il avait acquis ce terrain de 4400 mètres carrés il y a dix ans pour le tiers du prix avant d’y faire bâtir une somptueuse villa par les architectes sud-africains du bureau Saota.

[…] L’ami discret franco-ivoirien

La même année, il avait quitté Trafigura et Genève du même coup. Demeuré consultant, il ne s’est pas beaucoup éloigné de l’univers pétrolier. Dans les émirats, ses bureaux sont établis à la même adresse que ceux de Frédéric Fatien, un Franco-Ivoirien qui possède la société Worldwide Energy. Cette société sans référence dans l’univers pétrolier a obtenu d’importantes cargaisons de brut à exporter depuis la Côte d’Ivoire, souvent revendues à Trafigura. Son essor a débuté lorsque Trafigura a été banni du pays, à la suite d’un scandale qui, quinze ans après, continue de ternir sa réputation et qui a valu à Jean-Pierre Valentini un séjour dans les geôles ivoiriennes.

C’était en août 2006. Les traders de Trafigura, affréteurs du Probo Koala, un vieux pétrolier, viennent de se lancer dans une périlleuse opération chimique en mer pour nettoyer un carburant acquis au Mexique à bas prix. Le port d’Amsterdam a bien accepté de traiter les résidus toxiques, mais pour un prix trop élevé au goût de Trafigura. Le navire erre dans les océans jusqu’à ce que la firme croise la société ivoirienne Tommy SA, inexpérimentée en la matière mais titulaire d’une licence délivrée quelques jours avant par les autorités. Ce n’est plus le problème de Trafigura : son sous-traitant déverse 528 mètres cubes de déchets toxiques aux quatre coins d’Abidjan, à l’air libre, provoquant une catastrophe sanitaire. Selon l’ONU, ces déchets auraient entraîné 15 décès, l’hospitalisation de 69 personnes et plus de 108 000 consultations médicales.

En Afrique, l’indignation est immense. Coutumier des missions délicates, le CEO Claude Dauphin, décédé depuis, se rend en Côte d’Ivoire avec Jean-Pierre Valentini pour jouer les pompiers. Ils sont aussitôt incarcérés durant six mois, avant que la firme ne scelle un accord avec les autorités, à 198 millions de dollars pour solde de tout compte. Depuis, Trafigura rejette toute responsabilité. Lire la suite.

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