Meurtre d’une journaliste : appel à Malte du Conseil de l’Europe

Jeudi 19 septembre 2019

Meurtre d’une journaliste : appel à Malte du Conseil de l’Europe

Par L’Obs avec AFP Publié le 19 septembre 2019 à 10h10

Strasbourg (AFP) - La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a appelé les autorités maltaises à lever les poursuites en diffamation engagées contre la journaliste Daphne Caruana Galizia, tuée en 2017, aujourd’hui transférées sur ses proches, dans une lettre dont l’AFP a obtenu copie.

Dans cette lettre adressée au Premier ministre Joseph Muscat le 12 septembre, la commissaire Dunja Mijatovi ? rappelle qu’au moment de sa mort dans un attentat à la voiture piégée, la journaliste d’investigation était visée par plus de 40 procédures pour diffamation.

Une trentaine se poursuivent aujourd’hui contre sa famille, en vertu d’une disposition de la loi maltaise qui permet au plaignant de poursuivre une procédure civile auprès des héritiers de la personne mise en cause.

La charge de la preuve revenant à l’accusé dans les affaires de diffamation à Malte, les héritiers de la journaliste d’investigation « pourraient avoir à révéler des informations portant sur son travail journalistique et ses sources », s’inquiète Mme Mijatovi ?.

Dans les cas concernant des sujets d’intérêt général comme la corruption, les autorités maltaises devraient selon elle « envisager d’inverser la charge de la preuve ».

La commissaire souligne que la protection des sources des journalistes est garantie par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et redoute que la crainte de poursuites de ce type n’ait un « effet paralysant » sur le journalisme d’investigation dans l’île.

Ces poursuites qui font peser un « fardeau financier et psychologique injustifié » sur la famille de Daphne Caruana Galizia, soulèvent aussi « des questions sur l’engagement des autorités maltaises à trouver et traduire en justice les commanditaires de ce crime affreux », estime-t-elle.

Elle appelle en conséquence les autorités maltaises à la fois à changer la législation sur la diffamation, qui représente actuellement « une vraie menace contre la liberté de la presse dans le pays », et à renoncer aux poursuites toujours en cours contre la journaliste.

Souvent qualifiée de « WikiLeaks à elle toute seule », Daphne Caruana Galizia avait révélé certains des pans les plus sombres de la vie politique maltaise, s’en prenant avec virulence à M. Muscat, mais aussi au chef de l’opposition.

Après sa mort, ses fils ont réclamé la démission du Premier ministre, l’accusant de s’être entouré d’escrocs et d’avoir créé une culture d’impunité ayant transformé Malte en « île mafia ».

Mi-juillet, trois suspects de l’assassinat de la journaliste ont été inculpés, mais le mystère demeure sur les commanditaires de l’assassinat.

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