La thèse du suicide d’un ex-gendre du président kazakh remise en cause
Rakhat Aliev avait été retrouvé mort dans sa cellule à Vienne en février 2015. Un médecin légiste allemand affirme qu’il a été assassiné par des professionnels.
LE MONDE | 14.12.2016 à 11h53 • Mis à jour le 14.12.2016 à 12h14 | Par Blaise Gauquelin (Vienne, correspondant)
L’affaire fait de nouveau la « une » des journaux autrichiens, qui ne sont pas d’accord. Rakhat Aliev, l’ex-gendre encombrant du président kazakh, Noursoultan Nazarbaïev, s’est-il suicidé en prison le 24 février 2015 ? Ou a-t-il été assassiné ? Le très sérieux hebdomadaire viennois Falter pencherait plutôt pour la première hypothèse. Mardi 13 décembre, il a révélé l’existence de mots d’adieu consignés dans le carnet de notes de M. Aliev et adressés à sa femme. Ont également été publiés des extraits de son dossier médical, faisant état d’une grave dépression. Le journal émet également des doutes quant à la possibilité d’organiser un meurtre dans la plus grande prison d’Autriche, celle où était incarcéré l’homme d’affaires au cœur d’un vaste scandale politico-financier.
Pourtant, le reste de la presse a largement repris les conclusions d’un médecin légiste allemand, venu présenter à Vienne lundi sa contre-expertise spectaculaire. Le septuagénaire s’appelle Bernd Brinkmann. Très réputé, il affirme avoir été mandaté par la veuve du défunt. Selon lui, Rakhat Aliev a bel et bien été assassiné par des professionnels. « Même un aveugle », a-t-il expliqué, aurait dû constater que « des mains étrangères » avaient reproduit la technique des meurtres de Burke et Hare. Ces deux tueurs en série du XIXe siècles sont restés dans l’anthologie du crime en Grande-Bretagne : ils comprimaient le thorax de leurs victimes, tout en bouchant leurs voies respiratoires.
Cette technique provoquait l’étouffement, en laissant peu de traces sur des cadavres revendus ensuite à un professeur d’anatomie. Bernd Brinkmann a transmis ses travaux au parquet. Ce dernier promet de les étudier, mais rappelle que deux cabinets d’expertise médicale, l’un helvétique, l’autre autrichien, ont tous les deux conclu au suicide.
[…] Entre-temps, Rakhat Aliev aurait eu le temps de recycler par des investissements en Autriche des millions d’euros, grâce à des montages financiers complexes et révélés post-mortem, lors du grand déballage des « Panama papers », en avril. En juin 2014, la justice autrichienne avait décidé de l’incarcérer. Mais elle n’aura pas eu le temps de le juger. Lire la suite.