Picasso : l’oligarque, l’héritière et le marchand d’art

Jeudi 17 septembre 2015

Enquête

Picasso : l’oligarque, l’héritière et le marchand d’art

Par Renaud Lecadre — 15 septembre 2015 à 19:56

Le négociant suisse Yves Bouvier a été mis en examen lundi dans l’enquête sur des vols présumés d’œuvres achetées par le milliardaire russe Rybolovlev.

Après Genève, Monaco, Chypre et Singapour, le litige entre le marchand de tableaux suisse Yves Bouvier et l’oligarque russe et président de l’AS Monaco Dmitri Rybolovlev fait un détour par Paris. Lundi, le premier a été mis en examen pour recel de vol. En cause, la revente de deux portraits de la dernière compagne de Picasso, Jacqueline, peints par le maître, et d’un cahier de 58 dessins à l’encre. Catherine Hutin-Blay, fille de la portraiturée, avait déposé plainte pour vol en mars. Rybolovlev, acheteur final, s’était alors empressé de se constituer partie civile, ravi d’enfoncer un nouveau clou. Mais l’affaire pourrait réserver quelques surprises.

Un détour par le Liechtenstein

La belle-fille de Picasso jure n’avoir « jamais » vendu ces dessins, entre-temps marouflés - installés sur une toile, histoire de les transformer en tableaux. Impossible, selon elle, de se séparer d’une « représentation de sa mère ». Bouvier proclame au contraire lui avoir versé 8 millions de dollars pour les dessins et gouaches. Et de brandir un virement effectué officiellement par sa société de marchand d’art, MEI, à une fondation immatriculée au Liechtenstein, Nobilo Trust Reg. Schaan, auprès de la Centrum Bank AG. A l’entendre, l’intitulé de cette coquille offshore lui aurait été suggéré par un intime de l’héritière Picasso.

Mais à ce stade, rien ne prouve que Catherine Hutin en serait l’ayant droit. Cela devrait faire l’objet d’une prochaine commission rogatoire internationale (CRI) délivrée par la juge d’instruction parisienne Isabelle Rich-Flament. Son avocate, Me Anne-Sophie Nardon, rétorque que sa cliente « n’est bénéficiaire d’aucun trust [une structure destinée à camoufler les ayants droit, ndlr] et ne connaît pas monsieur Bouvier ». Mais elle n’exclut pas « des ventes réalisées à son insu ». L’affaire de vol pourrait alors virer à l’abus de faiblesse…

En attendant, la magistrate a singulièrement revisité la caution judiciaire infligée à Yves Bouvier : des 27 millions d’euros envisagés (soit le prix du rachat final par Rybolovlev), seuls 5 millions devront être versés d’ici la fin de l’année. Lire la suite le site du journal Libération.

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