Le marché des yachts a le vent en poupe en Chine

Jeudi 7 août 2014

Le marché des yachts a le vent en poupe en Chine

Par AFP le 07 août 2014

Fortune faite dans la finance, le Chinois Li Wang veut compléter sa panoplie en s’offrant un yacht, qu’il cherche en flânant dans la marina de la ville de Dalian, où un bateau peut coûter jusqu’à 80 millions d’euros… Hors taxes.

« Je ne connais pas grand chose aux yachts », reconnaît le jeune homme, qui compte pourtant piloter celui qu’il entend acquérir. « J’aime tout faire moi-même. C’est comme cela que je m’amuse. »

Le port de Dalian vient d’accueillir pour la première fois le mois dernier un salon nautique centré sur le luxe, où les clients se sont vu aussi proposer des jets privés ou des placements à Monaco.

Les constructeurs rencontrés par l’AFP sont unanimes : même si les Chinois répugnent à s’exposer au soleil et que la culture du yachting reste embryonnaire en Chine, le marché potentiel est énorme.

« Pensez seulement à l’industrie automobile, il y a 10 ou 15 ans : personne n’imaginait que la Chine allait devenir le premier marché mondial », s’enflamme Traugott Kaminski, patron pour la Chine des yachts italiens Sanlorenzo.

L’homme fait figure de pionnier. « En 2003 j’ai amené en Chine deux yachts de luxe, de 60 et 70 pieds (18-21 mètres). A l’époque, il n’y avait pas de législation, pas de ports, pas de culture nautique. »

Les choses ont bien changé depuis. L’explosion immobilière a favorisé un vaste développement des marinas, dont l’image attire les promoteurs.

Parti de zéro, le marché a décollé, notamment grâce à une clientèle « corporate » combinant loisirs et affaires.

  • Yacht sans moteur pour l’esbroufe -

Toutefois, la campagne anticorruption menée par le président Xi Jinping a perturbé cet essor.

« Nos ventes ont un peu plongé » l’an dernier, admet Marco Valle, des yachts Azimut, l’un des principaux acteurs mondiaux. « Mais cette année nous constatons une reprise, la confiance est de retour. »

Il évoque en souriant le premier yacht qu’il a vendu en Chine. Son client shanghaïen lui avait demandé un bateau sans moteur, car il comptait le laisser à quai pour impressionner ses relations d’affaires.

« En Europe, vous partez en croisière en bateau deux à trois semaines. En Chine, vous faites une sortie à la journée, donc pas besoin de beaucoup de cabines. En revanche il faut des espaces privés, un salon, un grand spa, de la place pour s’amuser », explique M. Kaminski.

En Occident, capitaine et équipage font souvent partie de la famille, contrairement à la Chine, où le poste de pilotage et la cuisine doivent donc être isolés. Autres différences, les Chinois apprécient une table ronde pour les repas, un karaoké, un plateau de mah-jong et davantage d’abris contre le soleil.

Ces particularités sont soignées dans les propres chantiers navals des Chinois, qui ont racheté ces dernières années deux grands constructeurs européens, le britannique Sunseeker et l’italien Ferretti.

Les professionnels de l’industrie tablent désormais sur le développement du marché vers les petits bateaux de plaisance ou au contraire les « superyachts ».

  • Seulement 3.000 bateaux de plaisance -

« En Chine, on commence par du gros bateau et le marché va se développer progressivement vers les petites tailles. On a eu exactement le développement inverse en Europe, où les gens achetaient des petits bateaux et, au fur et à mesure qu’ils gagnaient de l’expérience et de l’argent, achetaient de plus en plus gros », souligne Paul Blanc, directeur pour l’Asie-Pacifique de Jeanneau.

Cette société française parie sur la « classe moyenne supérieure » chinoise, à qui elle veut proposer des bateaux de 5 à 25 mètres. Un public qu’il va falloir initier à la voile, la pêche, le ski nautique, les régates.

La Chine compte seulement 3.000 bateaux de plaisance, quand les Etats-Unis en ont environ un pour 15 habitants, une « marge de progression énorme », se félicite M. Blanc. Malgré la taxe de 43% appliquée aux bateaux importés.

Un faux obstacle pour les futurs clients de superyachts, assure Jona Kan, directeur des ventes de Silver Yachts, une société fabriquant des navires en aluminium dépassant les 70 mètres de long.

L’entreprise n’en a vendu que trois, à un prix confidentiel, au Moyen-Orient et aux Etats-Unis. Elle se tourne aujourd’hui vers l’Asie.

« Nos yachts vont être achetés par des Chinois modernes qui sont déjà descendus dans les plus grands hôtels du monde et désirent maintenant se rendre à des endroits inédits, tout en étant chez eux », explique M. Kan.

Ayant déjà investi dans les paradis fiscaux, ils n’auront pas besoin d’importer leur bateau en Chine, dit-il ouvertement.

« Ils peuvent l’acheter offshore. Le bateau est construit en Australie, mais sous pavillon des îles Caïman ».

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