L’argent russe de « Londongrad » influence le pouvoir britannique

Lundi 10 mars 2014

L’argent russe de « Londongrad » influence le pouvoir britannique

LE MONDE | 10.03.2014 à 11h19 • Mis à jour le 10.03.2014 à 11h19 | Par Eric Albert (Londres, correspondance)

Ce sont les appartements les plus chers et les plus luxueux de Londres. Leurs baies vitrées ultramodernes offrent une vue imprenable sur Hyde Park. Un couloir souterrain les relie au Mandarin Oriental, le palace où officie le chef étoilé Heston Blumenthal. Au total, les 76 logements de One Hyde Park, un bâtiment conçu par le célèbre architecte Richard Rogers, se sont vendus pour 1,7 milliard d’euros, soit 22 millions chacun en moyenne, selon une enquête de Nicholas Shaxson, auteur d’un livre sur les paradis fiscaux.

C’est ici que des Ukrainiens pro-européens ont choisi de manifester à plusieurs reprises ces derniers mois.

[…] « BASE POUR GÉRER LEUR FORTUNE PERSONNELLE »

La capitale britannique est la place financière incontournable des oligarques russes et de tous les pays de l’ex-URSS, au point d’être parfois surnommée « Londongrad ». Les acheteurs russes comptent pour 10 % des résidences de grand luxe, selon l’agence immobilière Knight Frank. La chambre de commerce de la Haute Cour britannique est prise 60 % du temps par des dossiers venant de Russie ou d’Europe de l’Est. L’extraordinaire procès entre Roman Abramovitch, propriétaire de l’équipe de football de Chelsea, et Boris Berezovski, opposant notoire à Vladimir Poutine, mort l’an dernier, s’était aussi déroulé à Londres.

« Beaucoup d’oligarques apportent à Londres de vastes quantités d’argent et utilisent cette ville comme base pour gérer leur fortune personnelle », estime John Christensen, de l’association Tax Justice Network. Selon lui, une large partie de ces sommes relève du blanchiment d’argent. Un banquier d’affaires londonien, spécialisé dans les affaires russes, confirme à demi-mots. « Beaucoup des activités russes sont légitimes, et le blanchiment ne se fait pas nécessairement à Londres, parce que c’est trop visible, mais c’est effectivement là que se trouvent les avocats, les juristes et les conseillers. »

Impossible de quantifier précisément le phénomène, puisqu’il s’agit d’argent illégal. Mais la banque centrale russe elle-même estime que les deux tiers des capitaux qui sortent du pays sont issus d’activités illicites. Selon Tax Justice Network, la fuite des capitaux de Russie en trente ans s’élève à 798 milliards de dollars.

LES OLIGARQUES BIEN INTÉGRÉS

Autre indice : les principaux investissements étrangers en Russie viennent de Chypre, des îles Vierges britanniques, des Bermudes et des Pays-Bas (via les Antilles néerlandaises), des paradis fiscaux, dont plusieurs dépendent directement de Londres. « En grande partie, c’est de l’argent blanchi qui revient en Russie », accuse Ben Judah, auteur d’un livre sur Vladimir Poutine.

Même les oligarques s’accusent entre eux. Lire la suite sur le site du journal Le Monde.

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