La liste française des paradis fiscaux jugée trop timorée

Mercredi 17 février 2010

La liste française des paradis fiscaux jugée trop timorée

16/02/10 - 14H52 - Reuters

PARIS, 16 février (Reuters) - Des associations critiquent la liste des paradis fiscaux établie par la France à laquelle ils reprochent de pénaliser des pays mineurs pour ménager ses relations diplomatiques et les intérêts de ses entreprises.

La liste, qui sera publiée cette semaine au Journal officiel, comporte 18 Etats et territoires non européens qui figurent sur la « liste grise » de l’OCDE et n’ont pas conclu d’accord d’échange de renseignements fiscaux avec la France. Y figurent les pays suivants : Anguilla, Belize, Brunei, Costa Rica, Dominique, Grenade, Guatemala, Iles Cook, les Iles Marshall, Liberia, Montserrat, Nauru, Niue, Panama, Philippines, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie et Saint-Vincent et les Grenadines.

« Prise entre ses intérêts diplomatiques et les intérêts économiques de ses plus grandes entreprises, la France veut ménager la chèvre et le chou », déplore Maylis Labusquière, de la branche française de l’organisation internationale Oxfam. "En publiant cette bien maigre liste (…), le gouvernement français envoie un signal très négatif et fait le jeu de ceux qui veulent faire croire que la lutte contre les paradis fiscaux est un dossier clos", ajoute-t-elle dans un communiqué. Renvoyant à la liste de l’organisation Tax Justice Network, Oxfam souligne qu’"aucun des territoires de la liste française n’apparaît dans les 20 premiers territoires considérés comme les plus opaques et les plus centraux par l’index, excepté le Panama". Sur cette liste, consultable à l’adresse, figurent en premières places l’Etat américain du Delaware, le Luxembourg, la Suisse, les Iles Caïman, la City de Londres, l’Irlande, les Bermudes, Singapour, la Belgique et Hong Kong.

PÉNALITÉS

Pour le CCFD-Terre Solidaire, « la France se trompe de cible » et « épargne les ’vrais’ paradis fiscaux ». « Bercy se focalise essentiellement sur les îlots des Caraïbes et du Pacifique et oublie les vrais sanctuaires de l’argent sale », écrit l’association dans un communiqué. Elle salue les pénalités prévues à l’encontre des paradis fiscaux « mais la liste comporte tant de territoires anecdotiques au plan économique que la sanction sera peu opérante », dit-elle. La loi de finances rectificative pour 2009 prévoit une série de pénalités sur les activités économiques dans ces Etats et territoires « non coopératifs ». Les taux de retenue à la source sur les dividendes, intérêts, redevances et rémunérations de prestations de services effectués par une personne exerçant une activité en France à un bénéficiaire domicilié ou établi dans un de ces territoires seront ainsi portés de 15% à 50% au 1er mars. De même, les taux du prélèvement sur les plus-values immobilières ou mobilières réalisées par des personnes physiques et des sociétés domiciliées ou établies dans ces territoires seront de 50% à compter du 1er mars. En outre, la déduction de charges payées ou dues à des personnes physiques ou morales domiciliées ou établies dans ces territoires pourra être refusée à partir de 2011. Dès à présent, des dispositifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales sont renforcés. A compter de 2011, le régime « mères-filles » qui permet de distribuer des dividendes en franchise d’impôt, et celui des plus ou moins-values à long terme, qui permet de bénéficier d’une imposition à taux réduit, seront refusés pour ces territoires. Enfin, l’obligation de transparence pour les prix de transferts entre sociétés d’un groupe multinational est dès à présent accrue. La liste française sera mise à jour au 1er janvier de chaque année, en fonction des nouvelles conventions signées ou du non respect des engagements pris par les Etats et territoires.

(Jean-Baptiste Vey, édité par Sophie Louet)

© REUTERS

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence Reuters.

Visitez le site de l’Agence Reuters.

Revenir en haut