« Rien n’a véritablement changé dans les banques suisses »

Dimanche 15 février 2015

« Rien n’a véritablement changé dans les banques suisses »

Samuel Jaberg

Alors que l’image de la place financière suisse est une nouvelle fois écornée par le scandale SwissLeaks et que la justice est sommée d’agir, Hans-Ulrich Jost, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’Université de Lausanne, estime que son pays n’en a pas fini avec de telles révélations embarrassantes.

SwissInfo. Avez-vous été surpris par les révélations sur l’évasion fiscale pratiquée à grande échelle par la filiale suisse de la banque HSBC à Genève ?

Hans-Ulrich Jost. Absolument pas. On crie au scandale alors que ces méthodes sont employées depuis la Seconde Guerre mondiale par des banques suisses qui veulent à tout prix optimiser leur accès au marché. En revanche, l’envergure de cette affaire est énorme, puisque selon les révélations de la presse, HSBC gérait dans sa grande majorité des comptes douteux.

[…] Depuis la crise de 2008-2009, l’évasion fiscale est devenue moralement indéfendable et la transparence est désormais un impératif dans tous les domaines, dont celui de la finance. Ne s’agit-il tout de même pas d’un marqueur important sur le plan historique ?

Je ne crois pas à ce changement fondamental dont on nous parle depuis quelques années. Beaucoup pensent qu’il est possible de rendre un placement dans une banque visible et transparent. Mais ce n’est pas le cas. Alors que nous sommes obnubilés par la fin du secret bancaire, de nombreuses constructions juridiques et financières ont vu le jour ces cinq à dix dernières années.

La finance internationale s’est complexifiée et la transparence est tout aussi faible qu’auparavant. Ces nouvelles pratiques ne violent d’ailleurs souvent même pas la loi. Je pense, par exemple, à l’optimisation fiscale pratiquée par les multinationales. Les manières et les méthodes changent, mais pas l’esprit et le but.

Les trusts seront précisément inclus dans le nouveau standard de l’OCDE concernant l’échange automatique d’informations. N’est-ce pas une étape importante ?

C’est de la poudre aux yeux. Les trusts ne sont en réalité pas contrôlables dans le système financier international. On a déjà trouvé des mécanismes sophistiqués pour outrepasser ce contrôle. Les petits épargnants sont contraints de se régulariser, mais les grosses fortunes, déjà bien positionnées sur les marchés internationaux, trouveront toujours une manière d’échapper à l’impôt. Lire la suite.

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