Les sous de Chirac

Samedi 1er septembre 2001 — Dernier ajout vendredi 22 juillet 2011

Les sous de Chirac

« On ne ramènera pas de valises pleines de billets ». (Denis TILLINAC, fondateur chiraquien de Renaissance France-Afrique, cité par Libération du 14/08/2001).

[La collecte est achevée et le budget de l’échéance 2002 bouclé ? En 1998 encore, l’Élysée ordonnait aux douaniers de Roissy de relâcher le « porteur d’une mallette contenant une très importante somme en argent liquide ». Celui-ci « avait expliqué que ces fonds provenaient de la “présidence du Gabon” et qu’ils étaient destinés au Club 89 », haut lieu afro-chiraquien (Le Monde du 09/12/1998)].

« J’ai soutenu très lourdement l’action de Jacques Chirac à l’époque où Robert Galley était trésorier […] au total plusieurs dizaines de millions de francs » (Étienne LORENCEAU de PRIENNE, “intermédiaire dans le commerce international”, le 09/03/2001 devant le juge Renaud Van Ruymbeke, enquêtant sur l’affaire Volback. Cité par Libération du 07/08/2001).

[Volback, société de protection des voitures contre le vol, a laissé un trou au Crédit lyonnais, ce qui n’est pas exceptionnel. Plus étonnante est la liste des personnes réunies autour de cette affaire :

– Robert Galley, ex-ministre de la Coopération et trésorier du RPR, au mieux avec Lorenceau ; – Walid Koraytem, vendeur d’armes libanais associé au fameux Adnan Kashoggi : intervenant jusque dans la forêt gabonaise avec la recommandation de Galley (cf. Billets n° 73), il “planta”, lui aussi une filiale du Crédit lyonnais ; – Pierre Rochon, beau-frère de Gérard Longuet (Parti républicain) et pilier du business franco-africain ; – Hervé Bourges, ancien président de TF1, rémunéré un temps 100 000 FF par mois par Volback ; il rêvait de devenir ministre de la Coopération ; – Giuseppe Gianpaoli, en affaires avec Gérard Colé (conseiller de Mitterrand, PDG de la Française des Jeux) ; il finança Le Matin de Paris avec l’argent de Volback . – Giancarlo Parretti, manager avec Florio Fiorini d’un abîme financier (la société d’origine vaticane Sasea) : 19 milliards de FF perdus, dont la moitié reportés sur le Crédit lyonnais ; – Lorenceau lui-même, qui vit en Suisse ; il a perçu 2,5 millions de FF d’Alain Cellier, l’ami financier de Longuet, via Experta Treuhand, la société blanchisseuse de l’ami de Mitterrand Roger-Patrice Pelat… (cf. Alain Carion, De Mitterrand à Chirac : Les affaires, Plein Sud, 1996, p. 86s ; Philippe Madelin, Les gaullistes et l’argent, L’Archipel, 2001, p. 190-191 ; Denis Robert et Ernest Backes, Révélation$, Les arènes, 2001, p. 306s). Quelle tambouille transpartisane, transalpine, interconfessionnelle ! De telles alliances catalysent une énergie astronomique. Comme dans l’implosion des “trous noirs”, l’argent est aspiré par dizaines de milliards : celui du Crédit lyonnais, mais aussi quelques pactoles africains. Où va-t-il ? Mitterrand et Chirac ne furent jamais très loin des ingénieurs qui œuvrèrent à sa capture. Le nucléocrate Galley serait-il l’un d’eux ? Le juge Renaud Van Ruymbeke, qui semble s’intéresser à cette énigme, l’ a entendu comme témoin assisté].

« Michel Roussin […] n’avait pas de fonctions officielles au sein du RPR, mais il a été décrit par de nombreux protagonistes du dossier [sur les marchés truqués d’Île-de-France] comme ayant joué un rôle central dans la mise en place et le fonctionnement du dispositif de financement des partis politiques, et plus particulièrement du RPR ». (Armand RIBEROLLES, Marc BRISSET-FOUCAULT et Renaud VAN RUYMBEKE, ordonnance du 17/07/2001. Intégralement reproduite dans Le Monde du 25/07/2001).

[L’ordonnance publiée par Le Monde est accablante pour les institutions françaises : en quel pays démocratique un Président soupçonné d’avoir mis en place un système de racket d’une telle ampleur pourrait-il rester en fonction ? Avec de bonnes chances d’être réélu, et de nouveau protégé de toute action judiciaire…].

« On m’a demandé de régler des billets d’avion pour Jacques Chirac à l’occasion d’une de ses campagnes électorales. J’ai conservé les chèques et les factures. J’avais réglé un million de francs de déplacements à la compagnie Euralair ». (André GUELFI, alias “Dédé la Sardine”, intermédiaire milliardaire, notamment dans le pétrole et le sport. Interview au Parisien du 27/06/2001).

[Via sa fiduciaire suisse New Sporting, Guelfi admet avoir financé d’autres voyages sur Air Entreprise. Selon la justice, il y en aurait eu 58 pour un seul des amis de Guelfi, Charles Pasqua. Lequel avoue benoîtement : « Je pensais qu’il avait suffisamment d’argent pour payer cela personnellement ». Le problème, c’est qu’il s’agit, pour l’essentiel, d’un argent détourné sur un prêt de 45 millions de dollars gagé sur le pétrole camerounais. Le montant ainsi détourné par le réseau Pasqua, via les Îles Vierges, est d’au moins 55 millions (Le Canard enchaîné, 27/06/2001 ; Le Monde, 04/07/2001)].

Extrait de Billets d’Afrique et d’Ailleurs N°95 - Septembre 2001 -

Billets d’Afrique et d’Ailleurs est la revue mensuelle éditée par Survie.

Publié avec l’aimable autorisation de l’Association Survie.

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