La version de Pierre Lethier

Lundi 18 septembre 2017

La version de Pierre Lethier

L’ex-espion français ne croit pas à la thèse du financement occulte de partis politiques.

Propos recueillis par Sylvain Besson Publié jeudi 31 août 2000 à 02:12.

Le voilà donc, ce « soldat de l’ombre » que l’on dit dévoué à la raison d’Etat, spécialiste des montages financiers très discrets et acteur important de l’affaire Elf. Pierre Lethier, un quadragénaire élégant et poli, réside à Genève où il dirige une société aux activités mystérieuses, plus ou moins en sommeil depuis le début des enquêtes sur Elf en 1997, la Compagnie de conseils et d’études industrielles (CCIE). En exclusivité pour Le Temps, il donne sa version des faits.

Le Temps : Le 2 août, vous vous êtes rendu à Paris où vous avez failli être arrêté. Que s’est-il passé ?

Pierre Lethier : Je suis allé à Paris de mon plein gré pour présenter mon point de vue et j’ai effectivement eu un entretien assez long avec les enquêteurs, mais ce qu’ils voulaient en réalité, c’était m’embastiller. Sans doute pensent-ils qu’une mise aux fers produit de meilleurs résultats que la discussion autour d’une table. Après quelques heures, j’ai été libéré, sans doute parce que mon avocat avait fait valoir que mon incarcération était illégale puisque j’avais été convoqué en qualité de témoin.

– Vous avez reconnu avoir touché près de 25 millions de francs suisses lors de l’acquisition de la raffinerie de Leuna par Elf. Quel a été votre rôle dans cette transaction ?

– J’ai agi dans le cadre d’un contrat de consultance, pour des prestations de ce que l’on appelle un peu précieusement « l’intelligence économique ». Cette activité consiste à assister une entreprise dans la conquête d’un marché. L’action du consultant est suivie par la présidence de la firme. Les accusations de financement de partis politiques par ce biais ne sont qu’un ramassis de rumeurs stupides. On ne m’a jamais demandé de faire cela. En revanche, il est possible que des cadres de la direction se soient servis eux-mêmes, que cette opération ait servi à détourner des fonds par un mécanisme du type : Paul demande à Jean une prestation légitime contre paiement de 1 franc, mais dit au conseil de l’entreprise que la prestation coûtera 2 francs. Jean recevra effectivement 1 franc en cas de succès et Paul pourra détourner 1 franc à l’insu de Jean.

– On vous présente comme un ancien agent secret. Qu’en est-il ?

Normalement, on ne parle pas de ce genre de choses. Je ne peux affirmer dans la presse que mon appartenance à l’armée française, mon grade, celui de colonel, et ma spécialité, le renseignement.

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