« L’après-Covid-19 pourrait-il être enfin l’ère de la justice fiscale et sociale dans le monde ? »

Mercredi 22 avril 2020

Afrique Économie mondiale

« L’après-Covid-19 pourrait-il être enfin l’ère de la justice fiscale et sociale dans le monde ? »

Tribune

Sophie Lemaître

La docteure en droit Sophie Lemaître rappelle que les revenus perdus à cause de l’évasion fiscale sont supérieurs aux dépenses de santé des gouvernements.

Publié aujourd’hui à 13h00, mis à jour à 13h29

Tribune. La crise du coronavirus a révélé l’état déplorable dans lequel se trouvent les systèmes de santé de par le monde, le combat auquel sont confrontés les travailleurs de la santé et les conditions lamentables dans lesquelles ils doivent travailler à cause de l’absence de lits et d’équipements de protection, mais aussi du manque de médicaments. Comment en sommes-nous arrivés là ?

Ces dernières années, les dépenses de santé des gouvernements ont été dramatiquement réduites dans le but de diminuer les dépenses publiques. En 2013, les dépenses de santé représentaient moins de 5 % du PIB dans de nombreux pays. Plusieurs pays de l’Union européenne ont réduit le nombre de lits d’hôpital. Par exemple, depuis 2013, la France a fermé plus de 17 500 lits d’hospitalisation complète. En Afrique, les pays ont drastiquement réduit leurs dépenses sociales pour obtenir des soutiens financiers et de ce fait manquent dramatiquement de ressources humaines et financières pour faire face à la crise. Par exemple, en Zambie, il y a un médecin pour 10 000 habitants et en Sierra Leone, le gouvernement ne dispose que d’un seul respirateur pour tout le pays.

[…] Le lien entre évasion fiscale et système de santé est clairement illustré par un article publié en septembre 2019 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En comparant les estimations des montants d’évasion fiscale des entreprises au niveau international et les dépenses des gouvernements pour la santé en 2013 dans 100 pays, la chercheuse Bernadette Ann-Marie O’Hare démontre que les revenus perdus à cause de l’évasion fiscale des entreprises sont supérieurs aux dépenses de santé des gouvernements. Si ces revenus étaient alloués au secteur de la santé, « les dépenses annuelles de santé des gouvernements pourraient passer de 8 dollars à 24 dollars par personne dans les pays à faibles revenus et de 54 dollars à 91 dollars dans les pays à revenus faibles intermédiaires ».

En d’autres termes, si les gouvernements recouvraient les impôts perdus à cause de l’évasion fiscale, ils pourraient financer les hôpitaux publics, améliorer la qualité des soins, en garantir l’accès à tous et fournir les moyens nécessaires aux travailleurs de la santé pour qu’ils effectuent leur travail dans de bonnes conditions. Lire la suite.

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