Guerre en Ukraine : prise dans une tempête financière, la Russie au bord du défaut de paiement

Jeudi 3 mars 2022

Guerre en Ukraine : prise dans une tempête financière, la Russie au bord du défaut de paiement

A la suite des sanctions occidentales, les obligations en roubles ne sont plus remboursées aux étrangers, la monnaie russe poursuit sa chute, et Sberbank a fait faillite en Europe.

Par Eric Albert (Londres, correspondance) Publié aujourd’hui à 02h11

La tempête financière continue en Russie. Une semaine après le début de l’invasion en Ukraine, et quatre jours après l’annonce des principales sanctions occidentales, la Bourse de Moscou demeurait fermée mercredi 2 mars, le rouble était en recul de 20 % et, désormais, le risque d’un défaut de paiement de l’Etat russe se profile. « Ça nous ramène plus de deux décennies en arrière », constate une source bancaire à Moscou. En 1998, l’Etat avait été incapable de rembourser sa dette et avait traversé une crise financière majeure.

Mardi soir, la banque centrale russe a annoncé une mesure massue : les étrangers qui détiennent des obligations d’Etat russes en roubles (dites OFZ dans le jargon) ne seront plus payés. Ils ne percevront pas les « coupons » qui sont leur sont dus, pour une période non définie. La mesure ne concerne pas les obligations en devises étrangères (dollars, euros…), qui est la définition officielle du défaut de paiement d’un pays, mais elle a jeté un sérieux froid sur le système financier. « C’est un défaut de fait, organisé, note Ludovic Subran, chef économiste à Allianz. Et pour les obligations en devises, est-ce qu’on est bien sûr qu’ils vont vraiment payer ? »

Bien qu’un peu plus prudent, Vincent Chaigneau, directeur de la recherche à Generali Investments, abonde dans le même sens : « Il y a une conjonction de facteurs, émanant des sanctions et des mesures de représailles russes, qui font craindre un défaut. » Même analyse de William Jackson, du cabinet Capital Economics : « La probabilité que le gouvernement ou les entreprises soient incapables de rembourser des dettes ou ne veuillent pas le faire a fortement augmenté. »

Un « choc considérable »

Depuis l’annonce des sanctions, la Russie fait face à une véritable hémorragie de devises et à un début de panique bancaire. Les longues files d’attente devant les distributeurs de billets à travers le pays en sont l’un des signes les plus évidents. Selon Allianz, qui base son calcul sur les interventions de la banque centrale russe, environ 12 % des dépôts bancaires russes ont été retirés en quatre jours.

Pour enrayer cette panique, la banque centrale russe est obligée de multiplier les mesures de contrôle des capitaux. Elle force les entreprises russes qui ont des revenus en monnaie étrangère à en convertir 80 % en roubles. Elle bloque l’épargne des étrangers vivant en Russie, en leur interdisant de vendre leurs titres financiers détenus dans le pays. Les Russes n’ont eux-mêmes plus le droit d’envoyer d’argent à l’étranger. Les autorités veulent tout faire pour conserver des euros ou des dollars, désormais très difficiles à obtenir. Lire la suite.

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