Je ne crois pas à la sincérité de Lahoud

Samedi 21 juillet 2007

3 questions à Denis Robert, journaliste et écrivain, auteur de nombreux ouvrages sur Clearstream

CLEARSTREAM

« Je ne crois pas à la sincérité de Lahoud »

NOUVELOBS.COM | 19.07.2007 | 16:41

Qu’est-ce qui lie tous les personnages entendus ces derniers jours dans le cadre de l’affaire Clearstream ?

  • Ce qu’ils ont en commun est d’avoir eu entre les mains les listings de Clearstream, les miens et ceux falsifiés. Cependant, aucun d’entre eux n’a les mêmes buts dans cette histoire. Je pense que Gergorin est sincère quand il affirme qu’il veut lutter contre le crime organisé, son dernier ouvrage le prouve. Et selon moi, Rondot est également sincère quand il dit qu’il a cherché la vérité et à répondre à la mission qu’on lui a confiée. En revanche, je ne crois pas à la sincérité de Lahoud quand il déclare n’avoir rien à voir avec la falsification des listings.

A son arrivée au pôle financier, Imad Lahoud a déclaré « ne pas connaître » le rôle des politiques dans cette affaire. Quel est son rôle à lui dans cette affaire ?

  • La réalité vient contredire les déclarations d’Imad Lahoud. Quand je le rencontre, en février 2003, mon dernier livre, « La boîte noire », vient de sortir, et je suis accablé par les procès. Mais je sais que j’ai raison. J’ai prouvé que Clearstream a ouvert des milliers de comptes dans des paradis fiscaux, et Régis Hempel m’a confirmé qu’il avait effacé les traces de ces transactions. Or, ce sont ces informations que Clearstream nie. A l’époque, j’ai envoyé ces fameux listings de 33.000 comptes à une trentaine de personnes, avocats, journalistes, magistrats…Des experts susceptibles de m’aider dans ma défense. Imad Lahoud m’a été recommandé par un ancien confrère de Libération, je lui ai remis les listings sans hésiter, je le referais de la même manière aujourd’hui. L’usage qu’il en a fait, je n’en suis pas responsable. Je ne sais pas s’il est lui-même à l’origine des falsifications, mais si ce n’est pas lui, je crois qu’il sait qui c’est.

Où en êtes-vous des procès qui vous ont été intentés ?

  • Je suis celui qui, le premier, a dit la vérité sur cette affaire. Les ennuis que j’ai aujourd’hui sont à la mesure de mes révélations. La sortie de mon livre, « Clearstream l’enquête » en juin 2006 a débloqué l’instruction. Je démontre à l’intérieur que le système de Clearstream n’a pas été piraté, et donc que la liste envoyée est bidon. Résultat : le livre est retiré des ventes pendant 27 jours. Sans doute parce que la vérité était trop gênante pour le pouvoir politique en place.

Quelques mois plus tard, pour les mêmes raisons, je suis mis en examen pour recel de vol et recel d’abus de confiance. Une absurdité totale, qui met en lumière l’instrumentalisation de la justice.

Aujourd’hui, je suis visé par 27 procédures en cours. Je suis à nouveau face au procès intenté au Luxembourg par Clearstream, qui me coûte beaucoup en énergie et en argent. Heureusement que je suis entouré de mon comité de soutien et qu’un vrai mouvement de solidarité s’est créé autour de moi. Je reste fidèle à ma ligne de conduite, un écrivain avant tout, qui continue à agir dans le but d’informer le public de ce que le pouvoir financier et politique cherche à lui cacher. Je suis et je reste un emmerdeur.

Propos recueillis par Solène Cordier

(le jeudi 19 juillet 2007)

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