Biens mal acquis : le parquet national financier demande un procès pour l’oncle de Bachar al-Assad

Jeudi 21 mars 2019

Biens mal acquis : le parquet national financier demande un procès pour l’oncle de Bachar al-Assad

Europe 1 13h51, le 21 mars 2019 , modifié à 15h26, le 21 mars 2019

Âgé de 81 ans, Rifaat al-Assad pourrait être jugé devant le tribunal correctionnel de Paris, notamment pour « blanchiment en bande organisée » de fraude fiscale aggravée.

Le parquet national financier (PNF) réclame un procès pour Rifaat al-Assad, oncle du président syrien Bachar al-Assad, soupçonné de s’être frauduleusement bâti en France un patrimoine immobilier estimé à 90 millions d’euros, indiquent jeudi des sources proches du dossier.

Si les juges d’instruction devaient suivre les réquisitions du PNF, signées le 8 mars, Rifaat al-Assad, 81 ans, serait jugé devant le tribunal correctionnel de Paris pour « blanchiment en bande organisée » de fraude fiscale aggravée et de détournements de fonds publics aux dépens de l’Etat syrien, ainsi que pour le « travail dissimulé » de gardiens et personnels de maison. Le ministère public demande en attendant le maintien du contrôle judiciaire limitant ses déplacements à l’international.

Un impressionnant patrimoine immobilier

« Nous contestons fermement les accusations qui reposent sur des analyses parfaitement erronées, des raccourcis et des témoignages d’opposants politiques historiques qui se contredisent », ont déclaré à l’AFP ses avocats Pierre Haïk, Pierre Cornut-Gentille, Julien Visconti et Benjamin Grundler. Aujourd’hui résident britannique, Rifaat al-Assad avait été contraint à l’exil dès 1984 à la suite d’un coup d’Etat manqué contre son frère Hafez, le père de Bachar al-Assad, qui dirigea le pays de 1971 à 2000.

A son arrivée en Europe, Rifaat al-Assad mène grand train, avec ses quatre épouses, ses seize enfants et sa suite de « fidèles ». En France, notamment, il accumule un impressionnant patrimoine immobilier jusqu’à ce que la justice se penche sur son cas en ouvrant une information judiciaire en avril 2014, après les plaintes des ONG anticorruption Sherpa et Transparency international. Le parquet national financier a fait l’inventaire : deux hôtels particuliers, dont l’un sur la prestigieuse avenue Foch à Paris et une quarantaine d’appartements dans des quartiers huppés de la capitale ; un haras et un château dans le Val-d’Oise, 7.400 m2 de bureaux à Lyon… En France, son patrimoine atteint les 90 millions d’euros. L’origine de sa fortune interroge

La plupart des biens ont été saisis par la justice française. En majorité acquis dans les années 1980, ils sont pour l’essentiel détenus par ses proches ou par l’intermédiaire de sociétés nichées un temps dans des paradis fiscaux - Curaçao, Panama, Liechtenstein - et désormais établies au Luxembourg. Pour le PNF, la constitution d’un tel patrimoine « est empreinte d’un évident souci de dissimulation ». Les investissements immobiliers s’étendent aussi massivement à l’Espagne, où 507 propriétés de la famille ont été saisies en juin 2017, pour une valeur de 695 millions d’euros.

L’origine de sa fortune interroge. Les enquêteurs soupçonnent un « enrichissement illicite de Rifaat al-Assad depuis l’accession au pouvoir de son frère », une thèse qu’il conteste en dénonçant des accusations politiques pour empêcher son retour en Syrie. Entendu à trois reprises, Rifaat al-Assad a toujours affirmé que l’argent provenait, depuis son exil européen, de la générosité du royaume saoudien. Ses avocats ont produit des documents pour justifier de dons de près de 25 millions d’euros entre 1984 et 2010 mais ces explications ont été jugées « très insuffisantes ». Sur le même sujet :

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