Afrique du Sud : trente ans après, l’assassinat de Dulcie September demeure une énigme

Dimanche 1er avril 2018

Afrique du Sud : trente ans après, l’assassinat de Dulcie September demeure une énigme

Publié le 28 mars 2018 à 18h59

Par Simon Henry

Trente ans après l’assassinat de cette figure de l’ANC en France, le 29 mars 1988, le mystère demeure sur l’identité de son auteur et de ses potentiels commanditaires…

Quelques secondes ont suffi. Pas de doute, les assassins savaient ce qu’ils faisaient. Une exécution au modus operandi aussi terrible que précis : quatre balles tirées au visage puis une dernière dans la nuque. Ce 29 mars 1988, vers 9 h 45, policiers et secouristes ont beau foncer toutes sirènes hurlantes en direction du 28, rue des Petites-Écuries, dans le 10e arrondissement de Paris, il est déjà trop tard. Dulcie September, représentante du Congrès national africain (ANC) en France, est morte sur le palier de son bureau.

[…] La France, complice de son assassinat ?

Voilà 30 ans que Dulcie a disparu. L’enquête n’a mis personne en cause, et l’affaire a été classée sans suite en 1992. Mais un rebondissement est tout de même survenu en avril 1998. Chargée de faire la lumière sur les crimes de l’apartheid, la Commission Vérité et Réconciliation auditionne le colonel Eugene de Kock, le chef des escadrons de la mort sud-africains. Et ses révélations sont fracassantes : il reconnaît avoir commandité l’assassinat de Dulcie September, affirme que l’un des deux tueurs missionnés se nomme Jean-Paul Guerrier et que c’est un mercenaire français, un proche de Bob Denard qui, à l’époque du crime, entretenait de bonnes relations avec Paris.

La France complice de l’assassinat de Dulcie September ? La thèse avait déjà été avancée par un ancien officier des services secrets français quelques jours seulement après le meurtre. Cet homme, que nous avons retrouvé mais qui tient à conserver l’anonymat, nous a confirmé que la DGSE savait pertinemment qui était Dulcie September et qu’elle avait été placée sur écoute. Mais il est ­catégorique : ce ne serait pas Jean-Paul Guerrier l’assassin, mais un autre mercenaire français, également proche de Bob Denard.

Ce nouveau nom, c’est un de ses informateurs qui le lui aurait donné. « Ma source se trouvait au bar Le Washington quand elle l’a entendu se vanter d’avoir neutralisé Dulcie September. » Un temps suivie par les policiers, la piste a été abandonnée au motif que le suspect se trouvait officiellement en Afrique du Sud au moment du meurtre. « Son alibi était bidon ! » maintient l’ancien officier de la DGSE.

[…] L’affaire est aujourd’hui prescrite, et il faudrait un élément tangible pour la relancer. Jacqueline, l’amie de Dulcie, ne se fait pas beaucoup d’illusions : « C’est un dossier sensible aussi bien pour la France que pour l’Afrique du Sud, et aucun de ces deux pays n’a intérêt à ce que l’on fouille davantage. Pour découvrir la vérité, il faudrait que des documents soient déclassifiés. Ou attendre que les ­protagonistes soient morts, pour qu’ils ne puissent plus être inquiétés. » Lire la suite.

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