Naufrage du Sokalique : prison ferme pour les marins, l’armateur relaxé

Mardi 22 janvier 2013

Naufrage du Sokalique : prison ferme pour les marins, l’armateur relaxé

Le capitaine et le second de l’Ocean Jasper, cargo turc qui avait éperonné en 2007 au large du Finistère un navire de pêche breton, le Sokalique, ont été condamnés mardi à Brest à 4 et 3 ans de prison ferme, tandis que l’armateur a été relaxé, une déception pour la veuve du marin disparu dans le naufrage et les matelots rescapés.

Les deux officiers supérieurs, de nationalité azerbaïdjanaise et jugés en leur absence par le tribunal correctionnel de Brest, ont été reconnus coupables d’homicide involontaire, délit de fuite et omission de porter secours à personne en danger. Ils avaient continué leur route sans s’arrêter après la collision. Le parquet avait requis mi-novembre des peines de 5 et 4 ans à leur encontre.

Ils ont également été condamnés à une interdiction à vie de commander un bateau de plus de 500 tonneaux, une peine jugée « très positive » par Yvette Jobard, veuve du marin disparu.

« Je suis soulagée et satisfaite de voir qu’au moins, ils ne pourront plus naviguer sur de gros bateaux », a-t-elle assuré.

L’armement turc du vraquier, la société Onurhan Denizcilik, poursuivi en tant que personne morale pour les mêmes chefs que le capitaine et le second et contre lequel une amende de 300.000 euros avait été requise, a en revanche été relaxé.

« Je trouve ça dommage parce qu’il (l’armateur, ndlr) se retranche derrière le capitaine et le second, mais c’est quand même lui qui a mené tous les débats depuis le départ », a jugé Mme Jobard, visiblement émue.

« Je suis un peu sous le choc, je ne comprends pas ce résultat ; le but était de montrer qu’on n’est pas forcément impuni devant de tels actes ; et puis là, l’armateur est complètement relaxé », a renchéri un des matelots du Sokalique, Semione Coupille.

Le tribunal a jugé que « le capitaine et le second ne sont pas des représentants de la personne morale, Onurhan Denizcilik, et qu’à ce titre, la personne morale (…) est exonérée de sa responsabilité pénale », a expliqué à l’AFP Me Vincent Le Luyer, avocat de l’équipage du Sokalique.

Le 15 novembre, au terme d’une audience de trois jours, le procureur Bertrand Leclerc avait requis la peine maximale à l’encontre du capitaine Rafik Agaev, jugeant qu’il était le « représentant légal » de l’armateur à bord du navire, même si au moment de la collision il n’était pas à la barre.

Il avait requis 4 ans contre Aziz Mirzoyev, censé être de quart la nuit du drame, jugeant que sa responsabilité était moindre mais qu’il avait fait preuve d’un « défaut de veille » manifeste.

MM Agaev et Mirzoyev sont sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis mai 2011.

L’armement a cependant été déclaré civilement responsable des préjudices causés par le capitaine et son second. Tous trois ont été condamnés solidairement à payer près de 90.000 euros au total à Mme Jobard, ses trois filles et aux matelots rescapés à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral.

Les parties civiles réclamaient plus de 200.000 euros, mais le tribunal a estimé que « des fautes de navigation ont été commises par le Sokalique », selon le jugement. La part de responsabilité de l’Ocean Jasper dans les préjudices subis par les parties civiles a ainsi été fixée à 75%.

Dans la nuit du 16 au 17 août 2007, le caseyeur de Roscoff (Finistère) et le cargo battant pavillon des îles Kiribati étaient entrés en collision à 60 milles nautiques (110 km) au nord de l’île d’Ouessant, dans les eaux internationales.

L’Ocean Jasper avait poursuivi sa route, malgré un trou dans sa coque que l’équipage s’était empressé de colmater. Le patron du caseyeur, Bernard Jobard, avait péri noyé, tandis que les six autres marins avaient pu être secourus.

L’ancien président Nicolas Sarkozy avait obtenu l’accord des Kiribati pour que l’équipage soit jugé en France et non dans le pays d’immatriculation du cargo comme le prévoit le droit de la mer pour les accidents dans les eaux internationales.

AFP

Revenir en haut