Liechtenstein : difficile sortie du paradis (fiscal)

Dimanche 16 octobre 2011

Liechtenstein : difficile sortie du paradis (fiscal)

La principauté promet de ne plus accepter l’argent sale. Mais les vieux réflexes demeurent.

De notre envoyé spécial au Liechtenstein Ian Hamel

En quelques mois, Katja Gey est devenue la personnalité incontournable du Liechtenstein. Cette jeune femme souriante aux cheveux courts porte le titre officiel de directrice du bureau des affaires internationales de la principauté. C’est elle qui, inlassablement, répète dans toutes les grandes capitales que son pays a changé et que le Liechtenstein accepte dorénavant de passer sous les fourches caudines de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

« Localement, certaines personnes et certains intérêts privés sont hostiles à notre choix de jouer le jeu de la transparence. Mais c’est ainsi, nous devons nous adapter », insiste Katja Gey. Si ce haut fonctionnaire de cette petite principauté de 36 000 âmes est très accessible, il n’en va pas de même de la société fiduciaire Allgemeines Treuunternehmen (ATU), l’une des plus importantes du pays. Le Point.fr aurait souhaité comprendre pourquoi ses filiales étaient installées en Uruguay, au Panama et à Anguilla, dans les îles Vierges britanniques, connus pour être des paradis fiscaux fort peu coopératifs. « Malheureusement », a-t-il été répondu, toutes les personnes « aptes » à nous recevoir au sein d’ATU étaient absentes …

Panique au registre du commerce

Entouré par des banques, le registre du commerce est installé au centre de Vaduz, lilliputienne capitale (5 000 habitants), presque en face du siège du gouvernement. C’est là que nous nous rendons pour demander un extrait concernant la Fondation « pour l’équilibre écologique, esthétique et humain », qui abritait l’île d’Arros, ce petit atoll du Pacifique « infesté de moustiques » selon François-Marie Banier et propriété de Liliane Bettencourt. Le document nous est délivré en quelques minutes : la Fondation a été liquidée le 28 janvier 2011. Question : sous quel régime est à présent administrée cette île ? Cette simple question déclenche la panique : l’employée, brusquement très embarrassée, nous quitte et se plonge de longues minutes derrière l’écran de son ordinateur.

Puis elle sort de son bureau, revient, ressort aussitôt et rattrape en courant dans le couloir un homme qui semble être son supérieur hiérarchique. Revenue enfin à son guichet, l’employée décide de s’occuper des personnes qui attendent derrière nous. Au bout d’une demi-heure, après être ressortie une troisième fois, l’attachée du registre du commerce nous explique que, pour obtenir le renseignement, nous devons adresser une lettre… au gouvernement du Liechtenstein ! Si notre curiosité va bien dans l’intérêt du pays, nous obtiendrons peut-être une réponse…

Le prince Max mis en cause

Robert Wallner, procureur général de la principauté, ne quitte ni son fauteuil ni son bureau lorsqu’il est interrogé sur les mésaventures survenues à Max von und zu Liechtenstein, fils du régent et patron de la banque LGT, la plus grande de la principauté. Une plainte a été déposée au parquet de Hambourg pour « soupçons de faute grave » à la fin de l’année 2010. « J’ai appris cela par les journaux. Je n’en sais pas plus », répond le plus haut magistrat de la principauté, avant d’ajouter : « Il n’y a pas d’investigations menées au Liechtenstein concernant le prince Max. » Pour ceux qui en doutaient, ce n’est pas tout de suite que la collaboration avec les autres pays sera chose acquise dans la principauté.

© Le Point.fr

Revenir en haut