Transparency juge Paris trop accomodant avec les paradis fiscaux

Mardi 16 février 2010

Transparency juge Paris trop accomodant avec les paradis fiscaux

Reuters 16.02.10 | 20h31

Par Jean-Baptiste Vey

PARIS (Reuters) - Le président de Transparency International France, Daniel Lebègue, s’inquiète de la publication par la France d’une liste de paradis fiscaux accommodante, qui risque d’affaiblir l’action internationale dans ce domaine.

Dans un entretien à Reuters, l’ancien directeur du Trésor estime que les 18 Etats et territoires visés sont des acteurs mineurs et que la France a « désarmé » avant d’avoir obtenu de vraies avancées.

« J’ai été très surpris de voir cette liste car elle ne correspond pas à l’objectif, à l’esprit et à la lettre de la disposition législative qui voulait donner au gouvernement des moyens d’action, des moyens de pression et des moyens de négocier et d’obtenir une application pleine et entière des promesses faites », déclare Daniel Lebègue.

« D’abord, elle est très courte, beaucoup plus réduite que la liste de l’OCDE. Deuxièmement, la France, non seulement ne se montre pas plus exigeante ou plus rigoureuse que l’OCDE, mais elle se montre plus accommodante », ajoute-t-il.

Daniel Lebègue déplore ainsi que des pays ou territoires comme la Suisse, Andorre, Monaco ou Singapour n’y figurent pas alors que les accords d’échange d’informations fiscales discutés avec eux n’ont pas encore été ratifiés ou que le respect de leurs engagements n’a pas encore pu être vérifié.

« Ce n’est pas comme ça qu’on va marquer des points dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale », lance l’ancien vice-président de BNP.

Transparency International est une organisation non gouvernementale spécialisée dans la lutte contre la corruption.

Les pays et territoires figurant sur la liste française sont : Anguilla, Belize, Brunei, Costa Rica, Dominique, Grenade, Guatemala, Iles Cook, Iles Marshall, Liberia, Montserrat, Nauru, Niue, Panama, Philippines, Saint-Kitts-et-Nevis, Sainte-Lucie et Saint-Vincent et les Grenadines.

RISQUE DE COUP D’ARRÊT INTERNATIONAL

Conformément à la loi de finances rectificative votée l’an dernier, les entreprises qui y travailleront verront certaines de leurs activités taxées plus lourdement et leurs obligations renforcées.

« Le périmètre d’application de ces sanctions est extrêmement réduit et concerne quelques centres offshore qui ont, à vrai dire, peu d’importance et sont situés à l’autre bout du monde », souligne Daniel Lebègue.

"Je trouve que l’on désarme beaucoup trop vite alors qu’on n’a pas engrangé de résultats effectifs dans la coopération internationale, dans l’échange d’informations et dans la levée du secret bancaire« , ajoute-t-il. »Je m’en inquiète beaucoup. Je considère qu’on est en train de marquer un coup d’arrêt dans une action internationale qui était bien engagée, avec le soutien de tous les grands pays du G20, et qui commençait à produire des résultats.« Selon lui, »le mouvement était en train de prendre naissance, de prendre de l’ampleur, et je crains beaucoup que cette nouvelle liste publiée par la France ait un effet contre-productif, qu’elle démobilise l’action internationale« . »Je comprends bien qu’on ménage l’intérêt de nos entreprises, de nos banques, qui opèrent dans des centres offshore, qui ont des filiales, je comprends ce principe de prudence, mais à condition de ne pas vider de substance l’action qui a été initiée il y a un an et demi dans le cadre du G20", ajoute-t-il.

Edité par Elizabeth Pineau

© REUTERS

Publié avec l’aimable autorisation de l’Agence Reuters.

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