Le tourisme finance la dictature !

Mardi 15 mai 2007 — Dernier ajout vendredi 22 juillet 2011

Le tourisme finance la dictature !

Birmanie

Des associations de défense des droits de l’homme lancent une campagne d’information pour « un tourisme responsable ».

Aung San Suu Kyi a célébré, samedi 19 juin, son 59e anniversaire en résidence surveillée. Le prix Nobel de la paix n’a toujours pas été libéré en dépit des rumeurs persistantes qui circulaient il y a quelques semaines, lorsque la junte birmane a autorisé la réouverture à Rangoun du siège de la LND (Ligue nationale pour la démocratie), le parti politique de Suu Kyi.

On est déjà très loin des promesses de la junte contenues dans la « feuille de route », voie pavée selon elle des meilleures intentions vers la démocratisation du régime et la transition politique. Le siège de la LND a de nouveau été fermé. À l’occasion de l’anniversaire d’Aung San Suu Kyi qui sera faite citoyenne d’honneur de la ville de Paris, l’association Info Birmanie soutenue par des ONG de défense des droits de l’homme (1) lance une campagne d’information « pour un tourisme responsable » dans ce pays.

Au début des années quatre-vingt-dix, la dictature birmane a engagé un vaste programme de développement du tourisme. Dès 1991, le prix Nobel de la paix mettait en garde contre cette pseudo-stratégie de l’ouverture et expliquait que son pays était l’un des rares au monde où les activités du tourisme étaient étroitement liées aux violations des droits fondamentaux.

« Faire du tourisme à Rangoun pose une question d’ordre éthique », explique Aurélie Zammachi de l’association Info Birmanie.

" En allant dans ce pays, les voyageurs cautionnent la dictature. Ils participent au blanchiment de l’argent de la drogue, principale source de revenus de la junte, encouragent le travail forcé sur des chantiers liés à l’aménagement touristique (routes, hôtels).

Ils avalisent le déplacement des populations expulsées de la proximité des sites touristiques. " L’augmentation du tourisme sexuel, la dégradation de l’environnement liée l’implantation de complexes hôteliers sur des sites naturels frappent la population locale, qui ne tire aucun bénéfice de l’industrie du tourisme.

L’ONG pointe aussi fortement la renaissance de pratiques rétrogrades qui étaient en voie de disparition comme les « femmes girafes » de l’ethnie Padaung. Concentrées dans de véritables zoos humains, exhibées comme phénomènes de foire, ces victimes ne doivent la continuité de ces violences que par l’intérêt qu’elles suscitent chez les touristes.

Or, ces touristes originaires en majorité d’Asie viennent aussi de France. " Nous fournissons le plus gros contingent de voyageurs occidentaux en partance pour la Birmanie « , relève Aurélie Zammarchi. » Nous espérons que cette campagne les aidera à réfléchir. "

L’association se défend d’un appel au boycott, " il s’agit seulement de faire connaître la réalité de la Birmanie.

Si les gens choisissent quand même de s’y rendre, nous mettons à leur disposition quelques conseils pour les sensibiliser au tourisme responsable : refuser les circuits proposés par l’agence touristique officielle et les moyens de transports gérés par l’État, écrire à l’ambassade de Birmanie en France afin de dénoncer les atteintes aux droits de l’homme ".

Dominique Bari

(1) Soutenue entre autres par Amnesty international, France-Libertés, la Fédération internationale des droits de l’homme, Reporters sans frontières, etc.

Publié avec l’aimable autorisation du journal l’Humanité.

Visitez le site du journal l’Humanité.

Pour aller plus loin quelques sites internets :

1) Le portrait de Mme Aung San Suu Kyi sur le site des Prix Nobels ;

2) Le portrait de Mme Aung San Suu Kyi sur le site de l’opposition birmane ;

3) A l’ouvrage « Noir Chirac » de François-Xavier VERSCHAVE, publié aux éditions Les Arènes. Lire notamment le Chapitre 10 intitulé « Roussin de Paris à Rangoon, via Abidjan » ;

4) Le rapport de International Crisis Group.

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