Les paradis fiscaux, des paradis pas du tout artificiels

Vendredi 1er septembre 2017

Les paradis fiscaux, des paradis pas du tout artificiels

Anne-Laure Delatte

Auparavant, les paradis fiscaux évoquaient les îles, le soleil, les Bahamas et des valises remplies d’argent liquide. Leur existence avait beau être moralement répréhensible, elle semblait anecdotique… Jusqu’à la crise de 2008. Largement porté par les contribuables, le coût de l’effondrement financier a en effet engendré un sentiment d’injustice que résume bien la formule « privatisation des gains, socialisation des pertes ». L’ONG Tax Justice Network estimait qu’en 2010 la richesse privée cachée dans les paradis fiscaux s’élevait à 21 000 milliards de dollars, soit l’équivalent des PIB des États-Unis et du Japon réunis [Henry, 2012]. Alors que la crise financière avait fait augmenter les dépenses publiques puis les impôts dans de nombreux pays, l’existence même de zones échappant à la fiscalité est devenue encore plus intolérable. Pour Chavagneux et Palan [2017], non seulement les paradis fiscaux permettent d’échapper à l’impôt, mais ils sont aussi utilisés pour contourner la réglementation bancaire et financière grâce à des montages sophistiqués qui permettent d’alléger les besoins en fonds propres issus des règles prudentielles. C’est ainsi qu’ils élèveraient l’instabilité financière. Comment définit-on un paradis fiscal ? Qui y opère ? Comment estimer l’évasion fiscale dans les paradis fiscaux malgré la culture du secret qui y règne ? Ces paradis fiscaux sont-ils responsables de l’instabilité financière ? Quelles sont les initiatives en cours pour lutter contre les paradis fiscaux ? Telles sont les questions auxquelles ce chapitre tente de répondre, en l’état actuel des connaissances sur un sujet encore assez peu exploré.

L’économie mondiale 2018 La Découverte, 2017 pp.41-54

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