La loi Fatca contre l’évasion fiscale se fait sentir aux USA

Lundi 3 novembre 2014

La loi Fatca contre l’évasion fiscale se fait sentir aux USA

3 Novembre 2014

Par AFP Les conséquences de la loi américaine Fatca, qui traque les comptes bancaires des contribuables américains à l’étranger, commencent à se faire sentir bien au-delà de ceux qu’elle cherche à taxer.

Evasion fiscale

Légitime croisade contre l’évasion fiscale ou impérialisme financier, les conséquences de la loi américaine Fatca, qui traque les comptes bancaires des contribuables américains à l’étranger, commencent à se faire sentir bien au-delà de ceux qu’elle cherche à taxer en priorité.

Entrée en vigueur il y a quatre mois, la règlementation Fatca (Foreign Account Tax Compliance Act) demande aux banques étrangères de rapporter au fisc américain (IRS) les comptes et avoirs de leurs clients désignés comme « personnes américaines ».

Devenus un fardeau administratif pour les banques, ces clients ont désormais souvent du mal à conserver ou à ouvrir un compte bancaire hors des Etats-Unis.

Les dispositions Fatca ne touchent pas seulement les 4 à 7 millions d’Américains vivant à l’étranger mais aussi les millions d’étrangers sur le sol américain, détenteurs de carte verte ou résidents sous visa. La nouvelle loi concerne tous les ressortissants américains, « un terme qui inclut les citoyens, les organisations, les résidents, parmi eux les détenteurs de carte verte », a indiqué le Trésor américain à l’AFP.

Quelque 100.000 établissements financiers dans 101 pays, dont la France, la Suisse et le Luxembourg, se sont engagés à se conformer à cette loi. Si les banques ne le font pas, elles s’exposent à une retenue de 30% sur les revenus de leurs investissements aux Etats-Unis. Théoriquement, elles ne sont tenues de transmettre ces informations au fisc américain que lorsque les avoirs des comptes en question dépassent 50.000 dollars.

« Je connais beaucoup d’étrangers vivants aux Etats-Unis qui ont vu leurs comptes bancaires fermés en Europe », affirme Dan Mitchell, économiste au centre d’études Cato Institute.

La Revue Suisse, la lettre diplomatique adressée aux Suisses de l’étranger, reconnaissait ainsi dans un article en septembre qu’« il arrive que les banques suspendent complètement la prise en charge des clients privés domiciliés à l’étranger (…) en raison du durcissement des règlementations et des exigences fiscales au niveau international ».

« Rien au sein de Fatca ne demande aux banques de fermer les comptes des ressortissants américains (…). Si elles le font, c’est leur choix », rétorque le Trésor.

Pour Richard Harvey, professeur de droit fiscal à l’université de Villanova (Pennsylvanie), qui a participé à l’élaboration de la loi Fatca en 2010, « le Trésor devrait être plus ferme (…) en exigeant des gouvernements que les ressortissants américains ne soient pas l’objet de discrimination par les banques ».

 Abandons de citoyenneté-Résultat, les citoyens américains à l’étranger ont rarement été aussi nombreux à renoncer officiellement à leur citoyenneté. L’année dernière, 3.000 Américains ont abandonné leur nationalité et 1.577 leur ont emboîté le pas au cours des six premiers mois de 2014, selon le Registre fédéral.

« La décision de renoncer à sa citoyenneté américaine n’exemptera pas ces individus de leurs obligations fiscales antécédentes », prévient le Trésor. Hasard du calendrier, le droit de répudiation de la citoyenneté américaine vient d’être relevé de 450 dollars à 2.350 dollars.

Au Canada, où vivent de nombreux binationaux, un groupe de citoyens mécontents, The Alliance for the Defence of Canadian Sovereignty, intente un procès au gouvernement canadien l’accusant d’avoir enfreint leurs droits en signant l’accord Fatca, selon le journal canadien Financial Post.

Pour Washington, la Fatca est un instrument de lutte contre l’évasion fiscale qui espère engranger 8 milliards de dollars sur dix ans, selon le projet de loi à son origine. « Je pense que cette estimation est sous-évaluée et que ce seront entre 20 et 30 milliards » qui seront récupérés, affirme Dick Harvey.

Pour Dan Mitchell du Cato Institute, « quel que ce soit le montant collecté, le coût imposé aux banques du secteur privé est bien supérieur ».

Cet expert dénonce aussi le manque de réciprocité de la législation. Le fisc américain n’est en effet pas autorisé aux Etats-Unis à collecter ces mêmes informations qu’il demande aux banques étrangères. « L’administration a demandé au Congrès de réformer cela, mais les chances que cela soit adopté sont infimes », souligne Dan Mitchell. « Il n’y a donc aucune réciprocité. C’est vraiment de l’impérialisme financier de la part des Etats-Unis », conclut-il.

« C’est pour le moins un paradoxe en effet », concède Richard Harvey, un des architectes de la loi.

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