La fiscalité suisse des trusts déçoit

Lundi 26 novembre 2007

La fiscalité suisse des trusts déçoit

Date de parution : Lundi 26 novembre 2007

Auteur : Myret Zaki

IMPOTS. Les directives helvétiques introduisent une inégalité de traitement entre résidents à l’étranger et résidents en Suisse.

La Conférence suisse des impôts (CSI) a publié le 29 octobre une circulaire fort attendue par l’industrie suisse des trusts.

Il s’agit de directives fiscales destinées à être appliquées par les cantons aux trusts gérés en Suisse. La CSI a voulu clarifier le traitement fiscal de ces véhicules de gestion patrimoniale, resté jusqu’ici relativement flou et négocié au cas par cas avec les cantons. La fiscalité des trusts est un enjeu important pour la Suisse, où l’industrie de la gestion patrimoniale est très développée. La CSI a donc voulu éliminer les incertitudes rencontrées par les sociétés de gestion et d’administration de trusts (ou trustees) concernant la fiscalité qui leur est appliquée. Les précisions portent non seulement sur la fiscalité des trustees, mais aussi sur celle des constituants (settlors) et des bénéficiaires.

Tout d’abord, l’ensemble des experts s’accorde sur un motif de satisfaction évident : la circulaire confirme une fois pour toutes que les trustees eux-mêmes ne sont pas des sujets fiscaux. Un trust ne peut donc pas être traité comme un contribuable distinct et ne sera jamais soumis à l’impôt lorsque ses trustees sont en Suisse.

Cette exemption fiscale est une très bonne nouvelle pour l’industrie. En ce sens, la place financière a réussi à maintenir son avantage concurrentiel afin que la clientèle internationale ne recoure pas à des trustees dans d’autres juridictions. Cette reconnaissance était un complément indispensable à la ratification par la Suisse de la Convention de La Haye sur les trusts, le 1er juillet 2007. Depuis, la place financière a inclus dans son droit international privé ces « ovnis » juridiques importés à l’origine du droit anglo-saxon, et très utilisés par les banques helvétiques pour le compte de leur clientèle privée. Ces structures sont en général constituées dans des juridictions telles que la Grande-Bretagne, Jersey et Guernesey, alors que la Suisse, le Liechtenstein ou le Luxembourg se spécialisent dans les services de gestion et d’administration des trusts.

Impôt sur le revenu

Mais la Suisse avait un autre objectif en ratifiant la convention, qu’elle n’a pas atteint : elle visait aussi à encourager la constitution de trusts par des personnes domiciliées sur son sol, et à favoriser l’établissement en Suisse des bénéficiaires de tels trusts. Or, sur ces plans, le résultat fiscal s’avère décevant. La circulaire introduit un durcissement fiscal pour les constituants et bénéficiaires de trusts qui résident en Suisse. Il vise en particulier les trusts discrétionnaires et irrévocables, qui sont les véhicules les plus utilisés pour la planification financière des familles aisées aux connexions internationales.

Gains en capital taxés

Ces trusts seront pleinement taxés en Suisse s’ils sont constitués par des résidents. Ces derniers devront continuer à déclarer l’ensemble de leurs revenus, sur des biens dont ils se sont pourtant dessaisis légalement (suivant le principe du trust), comme si le trust n’existait pas.

En d’autres termes, la circulaire considère ces trusts comme transparents au plan fiscal. Les droits de succession et de donation sont également dus. Conséquence : ni les Suisses ni les résidents étrangers fortunés (sans forfait), ni les expatriés ne vont en pratique recourir à de tels trusts.

En revanche, et c’est là que réside l’inégalité de traitement, s’ils ont été constitués par des individus avant leur arrivée en Suisse, les trusts seront exempts d’impôt. Mais, dans ce cas, les bénéficiaires basés en Suisse seront taxés sur les gains en capital…

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