« Je montais dans le bureau, je posais le sac dans un coin »

Mardi 18 novembre 2014 — Dernier ajout samedi 3 juin 2017

« Je montais dans le bureau, je posais le sac dans un coin »

Yann PHILIPPIN 17 novembre 2014 à 21:16

ENQUÊTE

Gérard Limat, comptable et ami de Serge Dassault, a raconté aux juges avoir, de 1995 à 2012, remis en cash à l’ex-maire de Corbeil 53 millions d’euros, transférés de Suisse. « Libération » et France Inter ont eu accès aux procès-verbaux.

C’est l’homme de l’ombre dont les confessions risquent de dynamiter le système Dassault.Libération et France Inter révèlent que le comptable suisse de Serge Dassault, Gérard Limat, a reconnu sur procès-verbal avoir remis au moins 53 millions d’euros en liquide à l’avionneur et ancien maire UMP de Corbeil-Essonnes, entre les années 1995 et 2012.

[…] Sur la seule période 2008-2012, qui englobe les trois élections visées par l’enquête, Gérard Limat a livré 7,45 millions d’euros en cash à Dassault. Il a également effectué pour 4,2 millions d’euros de virements suspects, pour l’essentiel à des habitants de Corbeil, dont plusieurs acheteurs de voix présumés. S’il a dit ignorer l’usage de ces fonds, cet homme de confiance de la famille Dassault a livré aux enquêteurs un témoignage exceptionnel.

De mystérieux virements

Le 25 juin 2013, les policiers perquisitionnent l’hôtel particulier du rond-point des Champs-Elysées, siège parisien du groupe Dassault. Les enquêteurs découvrent un relevé de compte luxembourgeois, sur lequel figurent deux virements à un délinquant de Corbeil. Le compte appartient à un citoyen suisse, Gérard Limat. Les juges lancent deux commissions rogatoires internationales. En mars 2014, les policiers helvètes perquisitionnent son domicile à Genève et son bureau à Meinier, dans la banlieue de la ville. Il explique qu’il est le « comptable » et « l’homme à tout faire » de son « ami » Serge Dassault. « Je ferai n’importe quoi pour lui, tant que la loi l’autorise. » Limat remet aux enquêteurs deux classeurs remplis de documents. Mais refuse de s’expliquer sur ses relations avec une société genevoise dénommée Cofinor. « Il s’agit de mes affaires privées », dit-il alors.

Le système Cofinor

[…] Sur les conseils d’une banque, Limat fait appel à Cofinor. Cette société genevoise, à la fois agent de change et chambre de compensation, était capable de livrer du cash un peu partout en Europe. L’avantage : on pouvait par exemple verser les fonds en Suisse et être livré à Paris, ce qui évitait de passer la frontière avec une valise de billets.

Cofinor a dû abandonner cette activité fin 2012 suite au durcissement des lois suisses antiblanchiment. La société assurait à ses clients une discrétion tout helvétique : les contrats stipulaient que « les opérations pourront être ordonnées oralement et ne feront pas l’objet de confirmations écrites ». Cofinor avait des clients prestigieux, comme l’héritière de L’Oréal, Liliane Bettencourt. Lire la suite du dossier sur le site du journal Libération.

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