Affaire Balkany : les juges s’intéressent à de mystérieuses fondations

Jeudi 18 février 2016

Affaire Balkany : les juges s’intéressent à de mystérieuses fondations

AFP Par Nicolas GAUDICHET

Les ennuis de Patrick Balkany ne sont pas terminés : les juges financiers s’intéressent à des fondations qui ont vu transiter d’importantes sommes et étaient jusque-là passées sous le radar des enquêteurs dans ce dossier de fraude fiscale. Le 15 janvier, le député-maire (Les Républicains) de Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine, est de retour dans le bureau de Renaud van Ruymbeke qui enquête depuis 2013 sur le patrimoine du couple Balkany et notamment sur trois villas aux Antilles et au Maroc, non déclarées au fisc et saisies.

Selon une source proche de l’enquête, il reste mutique quand le magistrat lui signifie deux nouvelles mises en examen : pour fausse déclaration de son patrimoine ; et pour 87.267,70 euros de voyages, entre 2010 et 2013, réglés en espèces à une agence de voyages de Levallois-Perret, des sommes non déclarées.

Mais, rapporte cette source à l’AFP, le magistrat interroge aussi l’élu sur des « structures, dont certaines étaient inconnues jusque-là », apparues au gré d’investigations en Suisse et au Liechtenstein, et derrière lesquelles se serait dissimulé le couple Balkany. « Je ne vous dis rien », rétorque l’intéressé.

Le juge est convaincu que le couple a successivement acquis deux villas à Saint-Martin via des sociétés du Liechtenstein, Belec et Real Estate French West Indies, dont les ayants-droit réels seraient respectivement Patrick et Isabelle Balkany.

Cette dernière a reconnu être propriétaire de la deuxième villa, Pamplemousse, via un héritage familial, ce dont doutent les enquêteurs. Mais le juge est parvenu à démontrer que c’est Belec, donc selon lui Patrick Balkany, qui a vendu la première, la villa Serena, le 31 juillet 2002, pour 3,5 millions de dollars. Sur cette somme, plus de deux millions de dollars sont arrivés le 20 août 2002 sur un compte au Lichtenstein de Belec. « Qu’avez vous fait des 2.054.322 dollars depuis 2002 ? », interroge le juge. Silence de Patrick Balkany.

« Fortes suspicions » de corruption

Mais le juge a retracé l’arrivée sur ce compte entre 2001 et 2004 de fonds dont il entend comprendre la provenance : près de 1,9 million d’euros, plus de 2,4 millions de dollars et environ 115.000 francs suisses, détaille une source proche du dossier. Si ces mouvements n’ont pas conduit à une nouvelle mise en examen, ils ont attiré l’attention des enquêteurs sur des structures nouvelles dans l’enquête : la panaméenne HMF, la Seawind Investment Baizers, des fondations parfois dissoutes, comme Springpark, Frontenac ou encore Biella, qui aurait été remplacée en 2014 par l’Union Business Development SA.

Et le juge de s’enquérir : « Disposez-vous d’autres structures ? ». Silence de Patrick Balkany. Ces informations ont été obtenues auprès des autorités du Liechtenstein, saisies en mars par une commission rogatoire internationale (CRI), dont l’AFP a eu connaissance.

Renaud van Ruymbeke y exprime ses « fortes suspicions laissant penser que M. Balkany a financé les deux villas de Saint-Martin avec l’argent de la corruption ». Ce qui, selon le magistrat, expliquerait « qu’il n’ait jamais déclaré ces villas comme étant son bien ».

Ce dispositif serait comparable à celui utilisé pour le riad de Marrakech, financé pour partie, de l’avis du juge, « par une société d’un promoteur en charge d’un très gros projet immobilier à Levallois ». Lors d’une perquisition mi-2015 à Marrakech, les enquêteurs ont trouvé de nombreux éléments accréditant la thèse selon laquelle les Balkany sont les réels propriétaires : des peignoirs avec les initiales « PB », l’ouvrage de Patrick Balkany, « Une autre vérité, la mienne », ou encore des livres dédicacés, comme cette Anthologie érotique de SAS, par Gérard de Villiers.

Ces informations « sont toutes le fruit d’une violation du secret de l’instruction », a déploré l’avocat du couple Balkany, Grégoire Lafarge, interrogé par l’AFP. « Des plaintes pour violation du secret sont en cours d’analyse, contre un certain nombre de médias mais aussi d’autorités diverses et variées de l’administration publique », a-t-il mis en garde.

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